Le commerce transsaharien est dominé par « l'or du Soudan ». Pendant tout le Moyen-Âge, le Soudan est le premier producteur mondial aurifère, loin devant l'Afrique orientale. Les gisements abondent dans les vallées supérieures du Sénégal (Bambouk), du Niger (Bouré) et de la Volta noire (Poura). Suivre la chaîne de l'or, c'est relater l'exploitation des mineurs (dont le nombre atteignait plusieurs dizaines de milliers), les fonctions de l'administration impériale qui touche des taxes vitales sur le trafic et en assure la sécurité, et surtout le rôle des commerçants.
Il faut distinguer les courtiers noirs, Sarakholé, Mandingues (ancêtres des Dioulas) et Haoussa, qui assurent généralement le transit entre le placer et la ville impériale ; les négociants d'Afrique du Nord et d'Égypte qui sont les véritables maître du trafic car ce sont eux qui fixent le cours de l'or et qui organisent les caravanes traversant le désert. Il faut ajouter enfin les négociants chrétiens, au premier rang desquels les Génois, qui redristribuent cet or soudanais dans l'Europe chrétienne.
Le commerce de l'or a ainsi suscité un trafic de marchandises fort diverses. Du sud provenaient les noix de kola (excitant très prisé avant la mode du thé), l'huile de palme, l'ivoire, les peaux, et à partir du XIVème siècle la Maniguette (poivre de Guinée).
Photo - Maniguette
Le Sahel fournissait la gomme et les cotonnades. Le Sahara était pourvoyeur de l'Afrique tropicale en sel. L'Afrique du Nord et l'Egypte exportaient des chevaux, des dattes, des barres de cuivre, du verre, des perles, des cauris originaires de l'océan Indien, des produits manufacturés (maroquinerie, bracelets et ustensiles en cuivre) et ... des livres.
Il faut ajouter le trafic des esclaves, en rappelant que les rois du Mali possédaient des esclaves turcs mais que l'essentiel de la traite s'effectuait des pays animistes vers les empires sahéliens et le monde méditerranéen musulmans.
Carte - Villes et routes du commerce transsaharien à la fin du XVème siècle
Il est difficile de quantifier cet énorme courant d'échanges. Ibn Khaldoun affirme qu'au XVème siècle les caravanes passant par le Hoggar pouvaient compter jusqu'à 12 000 dromadaires. Seul le transport du sel est onéreux. Le troc était réservé à des échanges particuliers (esclaves contre chevaux...).
Les monnaies étrangères, notamment arabes, avaient cours dans les royaumes noirs, et Kano, par exemple, avait ses changeurs. Les instruments d'échange les plus utilisés furent la poudre d'or, les baguettes de fer et plus souvent de cuivre, qui pouvaient être artistiquement forgées, et surtout les cauris... qui défiaient les contrefaçons et avaient cours presque partout.
Les villes sahéliennes, Aoudaghost (proche de Tichitt), Koumbi-Saleh (proche de Walata), Walata, Djenné, Tombouctou, Gao, Kano sont les filles du commerce transsaharien. Mosquées, palais, universités y sont édifiés ; juristes, savants, étudiants côtoient commerçants et fonctionnaires. Les marchés font vivre une foule de piroguiers, caravaniers, guides, restaurateurs, artisans adonnés au travail du bois, à la préparation des peaux, au tissage du coton, à la confection des vêtements, à l'orfèvrerie, etc...
Carte : Sidjilmassa, « port du nord du Sahara » du commerce transsaharien
Une ville : Sidjilmassa, « port du nord du Sahara »
Durant des siècles, la ville de Sidjilmassa, dans le Tafilalet, fut la principale base nord-africaine du commerce transsaharien. Dans les premiers temps, les routes commerciales partaient de Sidjilmassa vers l'Adrar avant d'atteindre Aoudaghost-Tegdaoust dans le sud de l'actuelle Mauritanie.
Sidjilmassa était le point de passage obligé pour les caravanes allant vers le sud ou en revenant. Plaque tournante et plus encore lien entre l'Afrique blanche et l'Afrique noire, elle était fréquentée par des commerçants venus de Fès, de Tlemcen et de toutes les villes littorales ou intérieures du Maghreb. Cette position « carrefour » apparaît comme évidente lorsqu'on compte les jours de marche la séparant de tous les pôles commerciaux de la région : six jours pour Ouarzazate, neuf à onze pour Fès, vingt pour Tanger et cinquante pour Kairouan ; vers le sud, douze jours pour Tamedelt et cinquante pour Aoudaghost.
Image satellite : Sidjilmassa « port du nord du Sahara » en 2005 (Google Earth)
Admirablement située, Sidjilmassa est également favorisée du point de vue agricole, grâce à l'eau qui y abonde. Tout en étant la porte du désert, la ville offre donc toutes les possibilités aux caravanes venues du nord qui doivent s'y approvisionner pour les deux mois de marche à travers 1 500 à 1 800 kilomètres de désert.
La fin du commerce
Sources :
- Le Sahel de Charles Toupet, 1992.
- Histoire du Maroc des origines à nos jours de Bernard Lugan, Ed. Perrin, Paris, 2000.