Cartographe - géomaticien,
ancien officier géographe
du Ministère de la Défense.
Les développeurs du site Web « Zombietown USA » vous invitent à orchestrer votre propre invasion de zombies aux États-Unis. C'est bien dommage, on ne peut pas le faire en France. Lettre ouverte aux programmeurs !
Mais attention ! Vous ne contrôlez qu’une partie de l’invasion : les points d’origine, que vous choisissez en cliquant sur la carte. Une fois la propagation commencée, vos zombies répondent à leurs propres règles ! (Règles gouvernées par un modèle mathématique)
Vous pourrez donc garder un contrôle minimal sur vos créations en faisant varier seulement 2 paramètres :
α :
À chaque rencontre entre un zombie et un être humain, les chances que le zombie soit éliminé, versus les chances que l’humain soit contaminé et devienne, à son tour, un zombie.
Une valeur plus faible de ce paramètre augmentera les chances de propagation des zombies.
μ :
Le temps nécessaire pour qu’un zombie parcoure un mille ( ~ 1.6 km).
Une valeur plus faible de ce paramètre accélèrera la propagation des zombies.
Suivant vos choix, vous verrez évoluer la situation en temps accéléré sur la carte du pays. Vos zombies y seront représentés par des pixels rouges.
Fait intéressant, l’étude mentionne que les régions les plus à risque lors de la propagation d’un fléau de ce genre ne sont pas nécessairement les métropoles, mais plutôt les villes qui sont entourées de plusieurs métropoles. À vous de faire vos propres observations et de formuler vos théories à ce sujet !
Si vous voulez connaître l’explication des chercheurs ou avoir de l’information sur la mathématique derrière les rouages de la carte, vous pouvez consulter l’étude disponible en ligne (en anglais seulement).
Pour les développeurs curieux de voir comment a été programmée la carte ou qui souhaitent transposer l’expérience à un autre contexte, le code source est disponible sur GitHub.
Finalement, pour accéder à la carte et démarrer votre propre invasion de zombies, c’est par ici !
http://mattbierbaum.github.io/zombies-usa/
Bonne chance !
Source : http://www.neogis.ca
Paysages de neige et de glace, exposition de gravures des années 1830-1860. Organisée et commentée par Olivier Joseph.
Cette exposition a eu lieu durant 3 mois dans la Chapelle des Pénitents de Vallouise dans les Hautes-Alpes (05) au printemps 2015.
Dans la première moitié du XIXe siècle, des artistes français et anglais dirigent leurs pas vers le Briançonnais et la Vallouise. Ils en dessinent les vallées, les villages et les sommets. Puis ils mettent au net leurs esquisses et les publient sous forme de gravures, dans des livres destinés aux premier touristes.
Moins d'une centaines de gravures représentant le nord des Hautes-Alpes et l'Ubaye sont connues. Parmi elles, quelques-unes, rares, montrent des paysages de neige et de glace. Ce sont celles que vous allez découvrir à travers ce billet et que l'on peut admirer en grande taille dans cette exposition.
Carte des lieux représentés dans les gravures
Dans les années 1830, Victor Cassien et Alexandre Debelle dirigent leurs pas sur les chemins et les routes de l’ancienne province du Dauphiné. Artistes grenoblois, ils visitent les villes et les villages à la recherche des monuments, souvent en ruines, de l’ancienne province du Dauphiné.
De leurs pérégrinations artistiques, ils rapportent des centaines d’esquisses qui, une fois lithographiées, sont réunies en un livre composé de quatre forts volumes et intitulé : Album du Dauphiné ou Recueil de dessins représentant les sites les plus pittoresques, les villes, bourgs et principaux villages; les églises, chateaux et ruines les plus remarquables du Dauphiné, avec les portraits des personnages les plus illustres de cette ancienne province ; ouvrage accompagné d'un texte historique et descriptif.
Cassien et Debelle participent du grand mouvement des « itinéraires pittoresques » qui voient des historiens, des romanciers – Victor Hugo et Prosper Mérimée… – et des artistes représenter les ruines de l’ancienne France, héritées du mouvement destructeur de la Révolution, mais aussi, et peut êtresurtout, de la Restauration qui cherche la nouveauté et ne s’encombre guère de l’ancien. Ces représentations de l’ancienne France ont comme ambition d’en préserver la mémoire et de les sauvegarder.
Dans l’Oisans et le Briançonnais, les ruines sont peu nombreuses. Ce sont surtout des villes et des villages qui sont représentés, des paysages aussi. Dans la vallée de la Romanche, les hautes falaises, les cascades puissantes, les gorges sombres impressionnent les artistes. Plus haut, au-delà de Bourg d’Oisans, ce sont les travaux de la nouvelle route du Lautaret qui retiennent leur attention.
Cette vue du village de Livet est la seule montrant l’hiver et la neige dans la Romanche. Elle laisse aussi découvrir un paysan et ses vaches, ainsi qu’un marcheur transi de froid.
Au coeur de cette nature qui impressionne, la présence humaine est permanente : les ruines de l’ancienne France sont aussi des paysages humains.
Posé sur piton rocheux dominant le Guil et verrouillant la combe du Queyras, véritable ni d’aigle, le château impose sa silhouette aux voyageurs. C’est un des monuments les plus représentés dans les gravures des Alpes du Sud du XIXe siècle. Mais celle de Victor Cassien est la seule à le montrer sous un manteau neigeux.
Hérité de la politique médiévale des Dauphins de mise en défense des hautes vallées, Château Queyras a traversé les siècles, et affronté bien des périples guerriers sans sourciller. Lors de l’invasion du duc de Savoie et de ses alliés, en août 1692, la petite garnison française a tenu tête victorieusement à plusieurs milliers d’hommes des régiments protestants venus se venger de la Révocation de l’Édit de Nantes par Louis XIV. Quelques semaines plus tard, à l’automne 1692, Vauban et ses ingénieurs imaginèrent et mirent en oeuvre des travaux qui donnèrent à la petite forteresse son allure définitive.
En cet hiver de la décennie 1830, Victor Cassien fait vivre le paysage en installant deux soldats, ou deux douaniers au pied du fort. La scène est dans l’air du temps : depuis le Traité d’Utrecht organisant, en 1713, la cession des vallées briançonnaises d’outremont à la Savoie, et le rattachement de l’Ubaye à la France, la militarisation des vallées et des crêtes alpines est une réalité qui va en augmentant. Pour les rois de France, comme pour les ducs de Savoie, puis les rois de Piémont-Sardaigne, il s’agit d’interrompre un mouvement commercial important qui, depuis des siècles, irrigue les deux états, et fait prospérer les vallées alpines, dont celles du briançonnais et du Queyras.
Dans la scène dessinée par Victor Cassien, il manque pourtant un acteur majeur de cette confrontation militaire et commerciale entre France et Piémont : le contrebandier queyrassin. Peut être se cache-t-il quelque part dans la gravure ?
Dans la plupart des gravures du Briançonnais et des Alpes du Sud figurent des personnages, seuls ou en groupes : bergers, paysans, muletiers, cavaliers, militaires… Ils présentent des attitudes stéréotypées : cela peut s’expliquer par le fait qu’ils ne figurent pas sur les esquisses des dessinateurs et qu’ils sont souvent rajoutés par le graveur, au dernier moment. Quant aux enfants, ils sont rarement représentés dans les gravures du XIXe siècle. Lorsqu’ils le sont, ils sont seuls, accompagnés d’un adulte qu’ils suivent, qu’ils regardent ou auquel ils obéissent.
Cette gravure de Victor Cassien est exceptionnelle : elle montre un groupe d’une vingtaine d’enfants glissant de bon coeur sur des luges fidèlement représentées. La multitude des détails – bonnets, casquettes… – et les attitudes variées et spontanées des enfants indiquent qu’une telle scène a été vécue par Victor Cassien.
Bien loin des discours du XIXe siècle qui enferment les montagnards et leurs enfants, six mois d’hiver durant, dans leurs étables, cette joyeuse sarabande d’enfants témoigne de leur familiarité avec la neige ; abondante en ce XIXe siècle, elle n’est pas un poids, ni un obstacle. Hier, comme aujourd’hui, les enfants des montagnes sortent pour s’amuser dès qu’il neige !
Entre 1824 et 1829, William Brockedon parcourt et traverse les Alpes à dix-huit reprises. Peintre talentueux, il est curieux de cet univers de vallées et de sommets. Mais avant toute chose, il est à la recherche de la route empruntée par l’armée d’Hannibal, et ses éléphants, pour aller combattre les légions romaines.
Cette quête sans fin, et sans solution, entraîne cependant Brockedon à la découverte des grands cols alpins. Dans le sillage des armées napoléoniennes, de nombreux cols d’altitude sont devenus des routes modernes dont l’audace des tracés, des galeries et des ponts jetés sur les abîmes impressionnent les voyageurs et leurs lecteurs.
Les historiens le savent : les cols n’ont jamais été des obstacles. Bien au contraire ! Depuis des temps immémoriaux, ils sont fréquentés en toute saison par des paysans, des militaires, des juristes, des percepteurs d’impôts, des clercs et des marchands. Au début du XIXe siècle, l’ampleur des guerres et l’accélération des échanges entraînent la modernisation des grand cols : Simplon, Mont-Cenis, Mont-Genèvre, Lautaret…
La gravure du col du Stelvio (2758 m) montre des rambardes de bois installées afin de garantir la sécurité des voyageurs. Mais elle montre surtout que la neige ne saurait arrêter longtemps les passages et les échanges. D’ailleurs, dans les gazettes de Lyon, de Turin, de Milan ou de Genève, les nouvelles des chutes de neige, de la fermeture et de la réouverture des cols alpins sont rapidement imprimées : elles sont nécessaires à la bonne marche du commerce.
Dans cette gravure, le personnage contemplant le paysage, avec un chien à ses côtés, n’est autre que Brockedon. Il prend un malin plaisir à se glisser dans nombre de ses gravures, marchant, chevauchant, contemplant ou dessinant les paysages grandioses qu’il arpente et qu’il admire.
William Bartlett représente ici une scène historique se déroulant en 1815. Après la défaite de Waterloo et l’abdication de Napoléon 1er, trois cent soldats blessés de la Grande Armée, soignés dans le Val Pellice par le Vaudois, furent obligés de regagner Briançon à travers le col La Croix et le Queyras. Portés sur des civières par les montagnards piémontais, soutenus pour les plus vaillants, ils furent pris dans une tourmente hivernale, et passèrent le col avec grande difficulté.
Dramatisé pour les besoins de la gravure et du récit, cette scène n’est pourtant pas éloignée de la réalité. À côté des cols principaux, des dizaines de cols secondaires permettent, depuis des temps immémoriaux de franchir les crêtes alpines. Dans le Queyras, les communautés payaient des familles, parfois sur plusieurs générations, afin d’entretenir les cols La Croix et Agnel, et d’en permettre le passage en toute saison. On damait la neige, on posait des croix et des repères, on construisit même un refuge. Et, surtout, on allait relever les morts : bien souvent c’était des voyageurs venus des pays de plaines, sans connaissance du milieu hostile de la montagne hivernale.
La chronique de cette volonté des hommes de garder ouverts les cols, nous est parvenue sous la forme de carnets, vieux de plusieurs siècles, conservant la mémoire de ces faits et gestes : les Transitons. Mais revenons un dernier moment vers cette scène dramatique. La précision du travail du graveur se découvre dans la présence de personnages franchissant le col : ils ne mesurent guère plus d’un millimètres sur l’original. Et pourtant, en quelques traits habiles sur la surface de cuivre, l’artiste a su donner vie à ces voyageurs anonymes pour qui les Alpes étaient un lieu de passage et non une impasse.
Dans le volume Dauphiné des Voyages pittoresques et romantiques publiés par Isidore Taylor et Charles Nodier entre 1820 et 1878, Léon Sabatier offre à ses lecteurs une véritable excursion en Vallouise, au détour des années 1850.
Depuis le village de la Bessée jusqu’au Pré de Madame Carle, puis au lac et au col de l’Eychauda, il est le premier à montrer les paysages naturels de la vallée à travers 11 gravures. Sabatier n’est cependant pas le premier à parcourir la Vallouise avec les yeux d’un touriste : les premiers guides du début du XIXe siècle, notamment les guides anglais Baedecker et Murray, proposent des itinéraires conseillant le détour le long de la Gyronde et jusqu’au pied des glaciers Noir et Blanc, puis le passage par le col de l’Eychauda pour gagner le Monêtier.
Les gravures de Sabatier sont imprimées dans un format plus grand que la plupart de celles existantes alors : environ 30 x 45 cm au lieu de 15 x 20 cm.
La qualité du trait, des détails et des textures ne doit cependant pas égarer : comme souvent, les paysages sont reconstruits par l’artiste. Les proportions sont exagérées, les hauteurs étirées, les largeurs comprimées. Mais qu’importe, le paysage s’impose par sa présence. Et il est reconnaissable.
Cette gravure du lac de l’Eychauda est la plus ancienne connue. Des peintures en couleurs seront produites plus tard, dans les années 1880-1890. Toutes offrent un point de vue dirigé vers la vallée. Seul Léon Sabatier dirige le regard vers le glacier de Séguret Foran dont la langue descend alors jusqu’au niveau des eaux.
Exagérément étirée en hauteur, voici la plus ancienne représentation artistique connue du Pré de Madame Carle et des glaciers Noir et Blanc. La confluence des glaciers n’existe plus depuis les années 1870 ; elle se poursuit au gré des modifications des régimes de précipitations et du réchauffement climatique. Malgré tout, le paysage est aisément reconnaissable.
La jonction des deux glaciers est confirmée par un document scientifique dressé dans les mêmes années : le dessin-minute de la carte de l’État-Major. Durant l’été 1853, avec pour seuls compagnons un guide et un muletier de la Vallouise, le lieutenant Émile Meunier a passé 54 jours à arpenter les vallées, les glaciers et les sommets afin de mesurer et de dessiner ce qui était alors un paysage connu et parcouru par les vallouisiens depuis des siècles ; mesuré et décrit au milieu du XVIIIe siècle par les cartographes militaires ; mais dont les hautes montagnes échappaient encore au regard précis des géomètres de l’État-Major. Cette histoire, méconnue, reste à écrire.
Cette vue d’un glacier au-dessus de la Grave – qui pourrait être celui du Tabuchet, avec vue sur le Bec de l’Homme – est exceptionnelle : à une époque où personne ne parle d’alpinisme dans le massif des Écrins, elle montre deux personnages à la surface du glacier. L’un est courbés de fatigue, l’autre admire les séracs. Alpinistes anonymes dont l’Histoire n’a pas retenu les noms, peut être sont-ils en route vers les sommets environnants…
La précision de la gravure atteste de la présence de Léon Sabatier sur le glacier, dans les années 1850. Elle dévoile la fascination qu’exercent alors les glaciers : fascination esthétique, mais aussi intérêt scientifique. En effet, depuis la fin du XVIIIe siècle, les glaciers sont au coeur de nombreuses questions dans le domaine naissant de la géologie scientifique : les blocs erratiques
découverts loin des glaciers actuels, en Suisse, en France, en Allemagne et jusqu’en Russie intriguent. Et la présence de moraines glaciaires dans les hautes terres et sur les côtes écossaises surprennent.
Plusieurs hypothèses prennent corps. Parmi elles-ci, l’idée que les montagnes aient pu être plus élevées et les glaciers bien plus étendus est sérieusement étudiée. En 1837, le géologue suisse, Louis Agassiz propose une théorie audacieuse : il fut un temps où la Terre était bien plus froide et partiellement englacée. Cependant, cette hypothèse contredit les lois de la thermodynamique : les corps évoluent toujours spontanément d’un état chaud vers un état plus froid. Comment, dans ces conditions, la Terre aurait-elle pu se réchauffer après ces périodes de glaciations ?
Ces énigmes expliquent le déplacement dans les Alpes des savants anglais étudiant les glaciers et les glaciations : Forbes, Tyndall… Il faudra attendre que la physique des glaciers, ainsi que celle des lentes variations de l’orbite de la Terre autour du Soleil, soient mieux connus pour que l’énigme des grandes glaciations soit enfin démontrée et admise.
Dans les années 1850, les glaciers ne sont pas un univers inconnu et terrifiant : ils intriguent et passionnent, avant même le développement de l’alpinisme sportif.
Edward Whymper est connu dans le massif des Écrins et particulièrement en Vallouise, pour ses exploits d’alpiniste : il a découvert la haute montagne en escaladant le Pelvoux (1861), puis en atteignant la Barre des Écrins (1864). Il s’illustre encore, en 1865, en étant le premier au sommet de l’Aiguille Verte ainsi qu’au Cervin. Il réalise la première ascension du Chimborazo, dans les Andes, en 1880.
Mais Whymper est, avant tout, un dessinateur et un graveur sur bois réputé. Ses gravures de montagne et d’escalade illustrent son livre paru en 1871 : Escalades dans les Alpes. D’autres gravures, nombreuses et méconnues comme celle-ci, accompagnent notamment des ouvrages sur les Alpes Suisses.
Pour quelle raison Whymper représente-t-il Félix Neff (1798-1829), pasteur genevois installé dans le Triève, puis dans la vallée de Freissinières et dans le Queyras, entre 1821 et 1827 ?
Comme de nombreux anglais visitant les Alpes au début du XIXe siècle, Whymper est membre d’une église non-conformiste dissidente de l’Anglicanisme : il est baptiste.
Socialement bloqués par le fait qu’ils ne sont pas anglicans, ces représentants des classes moyennes éduquées viennent chercher dans l’exploration géographique, dans la mission vangélique ou dans l’exploit sportif, un reconnaissance à laquelle ils aspirent.
Entre la Suisse, berceau de la Réforme, les vallées Vaudoises situées en Italie derrière les col du Briançonnais, et la présence protestante dans le Queyras et à Freissinières, les lieux de mémoire du protestantisme ne manquent pas.
Cette profusion de gravures anglaises représentant les Alpes du Sud, celles de Brockedon, Bartlett, Monson ou Whymper, est avant tout le témoignage de l’attachement et des liens vivants entre les minorités protestantes anglaises et leurs frères des Alpes du Sud.
William Bartlett est friand de paysages nocturnes éclairés par la Lune. C’est ainsi qu’il dessine la cascade de Dormillouse, mais aussi le lac et le village de la Roche-de-Rame. Les formes noires et lugubres des montagnes contrastent avec le blanc des crêtes baignées de lumière. Malgré la nuit, le mouvement du «peuple des images » ne saurait cesser : voyageur accompagné d’un chien, paysanne guidant une mule et son chargement… les gravures sont vivantes.
Comme ses compatriotes, Brockedon, Monson ou Whymper, Bartlett parcourt les Alpes les yeux grand ouverts, à la recherche des paysages grandioses qu’il présente aux lecteurs anglais. Et comme eux, c’est la présence passée et actuelle des Réformés qui guide ses pas. Dans les Alpes du Sud, ce sont les Vaudois piémontais et leur église qui a traversé les siècles malgré les persécutions, et leurs frères médiévaux de la Vallouise et de Freissinères qui font l’objet de toute son attention.
Ces gravures offrent un regard multiple sur les montagnes du Briançonnais : l’Histoire des Hommes, leurs traces architecturales – fortifications, routes et cols, villages, ponts et tunnels… –, le témoignage religieux et la grandeur des paysages y sont intimement entremêlés.
La présence obsédante des torrents et des cascades a souvent été comprise comme un thème structurant de l’esthétique romantique. Peut être a-t-on oublié d’y voir aussi la représentation d’un savoir géologique en cours d’élaboration : celui de l’histoire naturelle des montagnes, des glaciers et de la Terre qu’élaborent Lyell, Darwin, Forbes, Agassiz, Beaumont…
Cette vue de la cascade de Dormillouse n’est pas un paysage de neige, ni de glace. Elle a été dessinée lors d’un voyage estival de William Bartlett. Elle est une invitation à poursuivre la découverte de ces gravures du Briançonnais, du Queyras, de la Vallouise et de Freissinères, à diriger nos regards vers ces paysages anciens, à nous rendre responsables de ce qu’ils deviendront.
Texte d'Olivier Joseph - 2015
A lire : Altas des montagnes. Espaces habité, monde imaginés, Xavier Bernier et Christophe Gauchon, cartographie et infographies d'Alexandre Nicolas aux Éditions Autrement (2013)
Voici une magnifique illustration cartographique de Ricky Linn. Les 50 états américains sont sur le dessin. Le visage est constitué par les 48 États centraux, l'Alaska représente un Burger king size et Hawaï qui dégouline sous forme de petites gouttes de Ketchup ! Bien vu également, la fausse couverture du Time soutenant le propos. On est foutu on mange trop !
Illustration : l'obésité, une pandémie en amérique de Ricky Linn
Pour rappel, l'Organisation mondiale de la santé définit l'obésité comme une accumulation excessive, voire anormale de graisse corporelle pouvant nuire à la santé. Pour la caractériser, on utilise l'indice de masse corporelle (IMC) en divisant le poids par la taille au carré (poids/taille²). La valeur considérée comme normale est de 20 à 25 chez l'homme et de 19 à 24 chez la femme. Au-delà, on parle de surpoids (IMC entre 25 et 29,9), d'obésité (IMC entre 30 et 39,9) et d'obésité morbide (IMC sup. à 40).
Les américains font partie des nations souffrant le plus de l'obésité avec une évolution de l'IMC de plus de 10% entre 1980 et 2008. Aux États-Unis, 35,7% des adultes - les hommes ayant rattrapé leur retard sur les femmes - et un enfant sur dix (16,9%) sont obèses. La population afro-américaine y est la plus touchée, notamment les femmes (58,5%) en 2013.
Dans les pays industrialisés et dans les classes aisées des pays en développement, l'obésité est devenue un problème majeur de santé publique qui prédispose à de multiples complications cardio-vasculaires, respiratoires et métaboliques (hyperscholestérolémie, diabète...). La pandémie accompagne la croissance que les politiques de santé publique peinent à ralentir. Environ 1,5 milliard de personnes sont touchés.
Un site internet permet de visualiser les États les plus touchés : http://stateofobesity.org.
Site internet de Ricky Linn : www.rickylinn.com
www.le-cartographe.net
Voici une idée cartographique pour qui souhaiterait décorer une pièce avec quelques clous et des fils de couture. L'exemple ci-dessous vous montre le résultat obtenu à partir du plan de métro londonien. A vous d'essayer avec Paris, New York, Berlin ou Lisbonne !
Une vidéo pour mieux comprendre ! fsm vpggru
Jenni Sparks : encore une artiste qui fusionne avec talent la cartographie et l'illustration. C'est beau et très instructif. Son travail, concerne, pour l'instant, trois grandes aglomérations : Berlin, New York et Paris.
Plan de ville culturel (entre la géographie sociale, économique et mentale), ses cartes presentent divers aspects de l'organisation d'une grande ville. Entre les grandes enseignes et les petits cafés, entre les magasins de luxe et les fromagers, ses plans vous offrent un véritable voyage à travers la ville. Plaisir des yeux...
Extraits du plan de Paris :
Pour se procurer ses cartes c'est ici !
Alors, honnête ou pas ? A priori, si vous perdez votre portefeuille, vous avez plus de chance de le retrouver à Helsinki, en Finlande, qu'à Lisbonne, au Portugal ! C'est le constat d'une expérience sociale du Reader Digest qui souhaitait savoir qu'elles sont les villes les plus honnêtes. Pour ce faire, ils ont donc "perdu" 12 portefeuilles avec à l'intérieur : 50 euros, des cartes de visite et photos de famille et un numéro de téléphone mobile. Résultats ?
Ouf, on échappe de peu à la honte totale, ville dans laquelle aucun portefeuille n'aurait retrouvé son propritaire. Mais en revanche on distinguerait presque un arc européen de la malhonnêté avec en tête Lisbonne et Madrid ! Les gens du nord plus honnêtes que les gens du sud ? C'est normal me dira Monsieur Dupont le nord est riche et le sud est pauvre. Il faut bien survivre ! Et bien non puisque Mumbai (Bombay) est plus honnête que Zurich ? C'est normal me dira le suisse, l'immigration est responsable de nos mauvaises statistiques. Heureusement pour nous, Paris n'est pas dans le panier et j'ai comme un pressentiment quant au score obtenu...
Bref tout ça pour dire que je doute un peu de la pertinence de cette expérience, à part contribuer à entretenir les lieux communs. Un panel de douze personnes n'est pas représentatif d'une population. Et comme disait un général de l'armée de terre lors de mon passage au Liban il y a quelques années : la courbe de gausse est la même un peu partout !
L'Atlas global : nos assiettes ne sont pas si mondialisées
Publié aux Éditions des Arènes, l'atlas global est un essai en images, conçu par une équipe de vingt-six historiens et géographes de renom. Extrait.
La planète alimentaire est partagée en deux grands modèles concurrents : l'un dont le bras est armé par l'industrie, l'autre qui reste attaché à des valeurs paysannes. Sagit-il pour autant d'une bataille culinaire ?
A la place des systèmes alimentaires des agronomes et des économistes, on plaide pour une géographie des cultures alimentaires donnant une répartition raisonnée des manières de manger dominantes et de leurs dynamiques.
Deux grands pôles ont été constitués depuis plusieurs millénaires avec un noyau chinois et un noyau au Moyen- Orient : dans les deux cas, les populations paysannes ont travaillé depuis des millénaires à la culture des céréales auxquelles on a ajouté, lors de repas cérémoniels, les viandes issues de pratiques sacrificielles et religieuses. Ces deux noyaux ont donné naissance à des cuisines sophistiquées, contrôlées par des médecines très élaborées. Certaines d’entre elles sont devenues de grandes gastronomies où les manières de manger ont pu confiner à de l’art.
Ces systèmes ont rayonné alentour de leur bassin d’origine auquel sont adossés des pôles secondaires autour de la Chine, comme l’Inde ou le Japon en Asie, mais aussi, récemment, en Europe avec les pays scandinaves ou l’Espagne, qui deviennent de hauts lieux « gastronomiques ». Dans ces systèmes, les repas restent des moments quasi sacrés qui accompagnent la vie familiale, les fêtes calendaires et les événements sociaux. Au nord du monde tempéré, s’est constitué un autre pôle largement industrialisé aujourd’hui. Ses origines sont dans la sphère mongole, où l’élevage était la ressource de base et a fabriqué un rapport utilitaire à l’animal. Cette culture carnée a gagné l’Europe à la faveur des invasions du premier millénaire. Le capitalisme marchand d’Europe et d’Amérique du Nord l’a transformé en filière très lucrative de viande industrielle.
Graphique : A table !
Fabriquant des produits de masse diffusés dans les villes par des réseaux de commerce très efficaces, l’industrie a gagné tous les pays du monde. Mais elle bute en Afrique sur un niveau de vie trop faible, un rejet culturel en Inde et dans certaines sphères sociales européennes et asiatiques. Stigmatisées pour leur responsabilité dans la progression des maladies cardiovasculaires et neurodégénératives, les cancers et le diabète, les nourritures industrielles ont fait émerger des contre-modèles dont les teikei* japonais, les terroirs français et les CSA (community supported agriculture) américains sont les parangons. Dans les marges subdésertiques chaudes ou froides où l’agriculture est difficilement praticable, les populations riches adoptent les modèles industriels (pays du Golfe, peuple inuit). À l’opposé, les pays en développement (du Sahel à l’Asie centrale) gardent des systèmes d’élevage qui restent précaires. Dans les régions équatoriales de l’Amérique latine, de l’Afrique et de l’Asie, subsistent des îlots d’alimentation vivrière soumise aux à-coups d’une vie politique et économique chaotique. Sur notre planète alimentaire, la mondialisation est très loin d’avoir gagné la partie.
Gilles Fumey
*Le Teikei (提携 ) est un système d'association pour le maintien d'une agriculture paysanne (AMAP) au Japon où les consommateurs achètent la nourriture directement aux agriculteurs.
Le Teikei est étroitement associée à une agriculture biologique locale à petite échelle, à but non lucratif, basé sur des partenariats entre producteurs et consommateurs. Des millions de consommateurs japonais participent au Teikei. Il est largement cité comme étant à l'origine de l'agriculture soutenue par la communauté à travers le monde.
A lire :
Quand la cartographie devient l'un des sujets d'un film c'est Trap Street, long métrage réalisé par Viviane Qu.
Vivian Qu, dont c’est le premier film comme réalisatrice, est la productrice de Black Coal de Diao Yinan, un polar chinois sorti cette année en France et qui a connu un vrai succès. Trap Street à été tourné avec un minuscule budget et peu de moyens, hors des circuits économiques et politiques du cinéma chinois.
Mais contrairement à l’univers de « film noir » de Black Coal, placé à la fin des années 90 et au début des années 2000, Trap Street, sorti en salle cet été, est un film très contemporain, illustrant les contradictions et ambiguïtés de la Chine actuelle.
Mais qu'est-ce qu'une « rue piège » ? C'est un terme habituellement employé pour désigner une rue qui apparaît dans une carte, mais qui n’a pas d’existence réelle, ou dont le tracé a été largement modifié par rapport aux relevés du terrain. Cette pratique est (ou aurait été) officieusement employée par certaines agences cartographiques afin de mettre en évidence d’éventuelles copies illégales de leurs données, et d’ainsi « piéger » les contrevenants (un exemple ici). Dans cette fiction chinoise sortie cet été en France, le principe de la « rue piège » est renversée, puisqu’il s’agit cette fois d’une rue réelle qui disparaît systématiquement de toutes les cartes officielles, et qui se révèlera un terrible piège pour le personnage principal.
Sans être un film majeur, l'approche du sujet est passionnante et peut devenir une réalité de la cartographie moderne. Pour rappel, Le GPS (Global Positioning System) est un système conçu par et pour l'armée des États-Unis et sous son contrôle. Le signal pourrait être dégradé ou modifié, occasionnant ainsi une perte importante de sa précision, si le gouvernement des États-Unis le désirait. C'est un des arguments en faveur de la mise en place du système européen Galileo qui est, lui, civil et dont la précision théorique est supérieure. La qualité du signal du GPS a été dégradée volontairement par les États-Unis jusqu'au mois de mai 2000, la précision d'un GPS en mode autonome était alors d'environ 100 mètres. Depuis l'arrêt de ce brouillage volontaire, supprimé par le président Bill Clinton, la précision est de l'ordre de 5 à 15 mètres.
Interview de Christian Grataloup dans le journal Les Échos (Pascale-Marie Deschamps), daté du 28 mai 2014.
Christain Grataloup (O.Roller)
Quand les hommes ont-ils commencé à tracer la route ?
D’abord, la route n’est pas, comme on le pense souvent, synonyme d’infrastructures. Longtemps elle a été tout simplement un chemin par où l’on pouvait passer, avec le sentiment qu’au-delà du col, de la forêt, il existait d’autres sociétés et d’autres produits que l’on pourrait échanger. En témoigne le vase de Vix, découvert en 1953 près de Châtillon-sur-Seine (Côte d’or). On a retrouvé cet objet cultuel grec d’une facture remarquable, haut d’un mètre quarante-cinq sur autant de large, dans la tombe d’une princesse gauloise inhumée cinq siècles av. J.-C. Les sociétés méditerranéennes commerçaient avec celles du nord, des peuples encore néolithiques, pour échanger leurs produits manufacturés contre l’étain, nécessaire à la fabrication du bronze, et les esclaves qui compensaient leur déficit chronique de main-d’œuvre. Certains chemins plus anciens encore ont désormais disparu. Entre 50 000 et 15 000 ans avant notre ère, le niveau des mers était inférieur de 150 mètres à ce qu’il est aujourd’hui. Grande-Bretagne et Japon n’étaient pas des îles, Australie et Nouvelle-Guinée n’en formaient qu’une seule. Il y a douze mille ans, on passait à pied sec le détroit de Béring, d’où cet arc linguistique « sibérien » qui relie certains peuples de la Sibérie aux Amériques en passant par l’Alaska.
Les routes maritimes sont-elles aussi anciennes ?
Tout à fait. On a retrouvé en Crète des silex taillés il y a 100 000 ans, alors que cette île s’est détachée du continent il y a deux millions d’années ! L’Australie a été peuplée 40 000 ans av. J.C., par la mer forcément. On sait aussi désormais à quel point les Polynésiens ont été de grands navigateurs. Leurs pilotes « lisaient » la mer comme les Touareg le désert. Ils repéraient les atolls de très loin grâce aux légères brumes qui flottent au-dessus, et se guidaient au goût de l’eau. Ils ont même laissé des cartes-maquettes où figuraient îles et étoiles. Ils ont quitté la Chine environ 3 000 ans avant notre ère et ont petit à petit gagné Taiwan, les Philippines, la Malaisie, l’Indonésie pour atteindre Madagascar et la Nouvelle-Guinée cinq siècles av. J.-C., puis Tahiti au début de notre ère et enfin l’île de Pâques. Ils pourraient même avoir atteint l’Amérique du Sud en suivant vents et courants. Au VIIIe siècle, ils avaient parcouru le Pacifique et l’océan Indien, soit les deux tiers de la planète ! Cela relativise quelque peu « les découvertes » occidentales des siècles suivants.
Quand les Européens se mettent-ils à naviguer ?
Ils commencent à explorer les mers et à construire des bateaux d’une plus haute technicité vers la fin du XIIIe siècle. Etroites et rapides, des galères de Venise atteignent Bruges. Cela leur permet d’éviter les routes terrestres et leurs nombreux obstacles, en particulier les forêts. Si les foires de Champagne, par exemple, ont eu un si grand succès à partir du XIIe siècle, c’est en partie parce que cette région était peu boisée. Les marchands y étaient plus en sécurité. Et puis ces itinérants n’aiment pas non plus qu’on les taxe, ce que font les souverains français. Aussi vont-ils contourner le royaume, par la mer d’une part, et par la vallée du Rhin d’autre part. C’est ainsi que se formera ce que le géographe Roger Brunet appellera en 1989 « la banane bleue » ou « dorsale européenne », ce célèbre croissant économique qui relie Londres à Milan… en évitant soigneusement la France.
Parallèlement se développe la route de la soie… Peut-on déjà parler de mondialisation ?
En quelque sorte. Elle est très ancienne. César connaît déjà la soie, un produit extrêmement coûteux à l’époque, dont la Chine a détenu le monopole jusqu’au VIe siècle. Les sociétés « à pattes » (éleveurs nomades) maîtrisent la route entre les mondes chinois et romain, sociétés « à racines » (agriculteurs sédentaires), et se renforcent à chaque fois que les empires enracinés s’affaiblissent. Les Mongols ont ainsi détruit Bagdad en 1258 et ont poussé jusqu’en Pologne. A son apogée, l’empire de Gengis Khan s’étendait entre l’Europe de l’Ouest et le Japon. Il a su transformer des routes nomades en territoire politique et en optimiser les échanges commerciaux en instaurant une pax mongolica fondée sur la mise en scène de la terreur : tas de crânes au bord des routes, humiliation des voyageurs, etc. Mais ce régime et la prospérité qu’il a apportée au long du XIIIe siècle ont permis à Marco Polo de se rendre en Chine, à l’imprimerie, la poudre à canon, etc., de se diffuser et à l’Europe de financer ses cathédrales. Seulement la mondialisation des biens et des personnes s’accompagne toujours de celle des maladies : au XIVe siècle, c’est la peste noire. L’Europe y a perdu un tiers de sa population, l’empire mongol s’est désarticulé et la route de la soie est redevenue périlleuse…
C’est la peste noire qui provoque la recherche d’autres routes… et la découverte de l’Amérique ?
Indirectement, oui. Aux XIIIe et XIVe siècles, l’élite européenne découvre le sucre et y prend goût. Et comme les autres épices, il faut de l’or pour le payer. Le mobile est assez puissant pour stimuler les aventuriers. Au XVe, les Européens cherchent donc une route vers l’Asie pour contourner le Moyen-Orient alors aux mains des Turcs, tandis que les Chinois cherchent une route maritime car la voie terrestre fonctionne mal. La Chine veut aussi faire la démonstration de sa puissance et susciter les allégeances. Mais les aventures des uns et des autres n’auront pas le même impact. La Chine, en effet, ne fait pas de réelle découverte. La célèbre flotte de Zhen He et ses 30 000 hommes (contre 105 marins pour Colomb) va suivre les vents de mousson qui la porteront jusqu’au Mozambique, mais ce sont des routes maritimes déjà millénaires. Les Européens, eux, ont commencé à explorer l’Atlantique dès la fin du XIVe siècle. Ils sont déjà à Madère et aux Açores. Surtout, les missions chinoises sont étatiques contrairement aux aventures européennes qui sont privées et bénéficient de la concurrence. Ainsi, lorsque Christophe Colomb se fait rabrouer par le roi du Portugal qui juge son projet irréaliste, peut-il se tourner vers celui d’Espagne et envoyer son frère cadet plaider sa cause auprès du roi de France. Tandis que, quand en 1432 la Chine décide d’interrompre les expéditions maritimes (la capitale s’est déplacée de Nankin à Pékin pour faire face au péril du Nord et les ressources sont désormais allouées à la défense de l’empire), les navigateurs n’auront pas le moindre recours. Les chantiers navals et les cartes maritimes sont détruits. La Chine se replie sur elle-même. C’en est fini de la découverte du monde.
Les Européens s’enorgueillissent de la découverte de l’Amérique. Mais aujourd’hui de nombreux pays lui contestent cette première. Ont-ils des raisons d’avoir raison ?
L’acte essentiel pour la connaissance de notre monde est sans conteste le franchissement de l’Atlantique par Christophe Colomb parce que cette route n’existait pas et qu’on ignorait l’existence du continent américain. Cette découverte fait donc l’objet de nombreux fantasmes. On a pu ainsi lire sous la plume du Britannique Gavin Menzies que les jonques de Zheng He avaient poussé jusqu’aux Amériques. Mais si c’était vrai, on trouverait des traces de leur passage. Ce qui n’est pas le cas à ce jour. Les Vikings aussi ont été jusqu’au Labrador en passant par les Hébrides, l’Islande, le Groenland, baptisée « terre verte » car le climat d’alors y permettait l’élevage. Mais le petit âge glaciaire du XIIIe siècle bloque le passage et l’Islande devient le terminus. On enseigne aussi aux écoliers sénégalais, sur la base d’une unique chronique arabe, que le prédécesseur du richissime empereur Moussa du Mali aurait envoyé 1 000 pirogues vers l’ouest au XIIIe siècle, dont l’une aurait atteint le Brésil. Pourquoi pas : les vents soufflent d’est en ouest et 3 000 km seulement séparent le Cap Vert de la pointe nord-est du pays ; c’est la partie la moins large de l’Atlantique. Mais là encore, cette « découverte » n’a laissé aucune trace et, surtout, il n’y a pas eu de « retour »…
C’est donc le retour de Christophe Colomb qui fait de sa traversée une véritable première ?
Oui, car ce n’est pas tant le premier voyage de 1492 qui est important, que le second, celui de 1493. Non seulement Christophe Colomb est revenu au Portugal, mais il repart, cette fois avec dix-sept belles caravelles toutes neuves, au lieu des trois navires d’occasion du premier voyage. On peut alors véritablement parler de « route » car un lien est créé.
Ensuite commencera la grande épopée des Compagnies des Indes… Encore une histoire de concurrence ?
Une histoire de concurrence qui sera la matrice même du capitalisme actuel. Au XVIe siècle les Espagnols et les Portugais règnent sur le Nouveau Monde, Venise contrôle encore la Méditerranée, mais son commerce est affaibli par les routes atlantiques. Au fil des guerres, les Hollandais s’affranchissent petit à petit de l’empire espagnol. Ils en viennent à financer leurs propres campagnes d’épices et fondent en 1602 la Compagnie unie des Indes Orientales (VOC). Une initiative de l’Etat financée par les bourgeois d’Amsterdam qui achètent des parts de la compagnie et se les échangent. C’est l’ancêtre de la Bourse. Ces expéditions sont en effet à la fois très coûteuses et très risquées, d’où le partage des risques. Les Anglais imitent les Hollandais, suivis des Français. Ainsi naît Lorient, anciennement Port-Louis. Ces courses vers les Indes vont considérablement enrichir l’Europe qui va pouvoir ainsi s’offrir le reste du monde – la colonisation – et financer ensuite la Révolution industrielle. La suite c’est ce nationalisme forcené qui conduira aux catastrophes suicidaires des deux Guerres mondiales.
L’Europe a conquis le monde. Mais avec le réveil des anciens empires (Inde, Chine) et l’émergence de nouveaux pays (Brésil), ses représentations géographiques, économiques, culturelles sont désormais en concurrence. Quels en sont les enjeux ?
Pour les historiens cela se traduit par une nouvelle approche qu’on appelle l’« histoire globale ». C’est une manière de replacer l’histoire européenne dans un ensemble plus large. Jusqu’ici ils considéraient le monde comme si eux seuls avaient une histoire – les autres n’étant que des « civilisations » intemporelles, comme si d’histoire ils n’en avaient pas. Notre description du monde et son découpage temporel et géographique procèdent en effet de conventions arbitraires : le Moyen Age n’a aucun sens pour les Chinois ou les Indiens. Les océans Pacifique et Atlantique ne forment qu’une seule masse liquide. Ce sont les encyclopédistes du XVIIIe siècle qui ont fait de l’Oural la limite de l’Europe et de la Mer Rouge la limite entre l’Asie et l’Afrique. Auparavant c’était le Nil… etc. Ces catégories sont certes utiles pour nos hommes d’affaires et assureurs, mais elles ne nous renseignent pas sur les visions que les autres ont du monde et ne nous aident pas à les comprendre. Au-delà, il s’agit désormais de penser l’histoire à l’échelle de l’humanité, non pas dans un face à face « nous et les autres », mais dans un « nous » global. L’humanité n’a pas d’ennemis, elle n’a que des problèmes – des ressources limitées dans un espace dégradé – qu’elle ne peut résoudre que globalement.
A lire :
Petite présentation de cet artiste :
LEMOCK interprète sa vision d'un monde en pleine déflagration, grâce à des stratifications de papiers collés.Il s’intéresse depuis longtemps à la sédimentation comme révélateur d’humanité. Pour lui, les paysages observés du ciel offrent un spectacle digne des maitres non figuratifs. Les lignes, les formes et les couleurs qui les traversent dessinent une oeuvre dont le génie humain s’est toujours inspiré.
Dans sa réflexion et son travail, l’artiste a fait naturellement le rapprochement avec les strates d’images venant se superposer sur les panneaux d'affichage qui envahissent l'espace urbain. A la manière d'un archéologue contemporain, l'exploration de chaque couche d'encre, permet de saisir un fragment d'information qui contribue ainsi à définir l'image que notre société se donne d'elle-même.
Tels les continents qu'il fait dériver, il voit les individus victimes de leur propre aveuglement. Beaucoup se perdent dans de futiles désirs matériels et se fracassent ensuite dans une violence qui, paradoxalement, s'illumine dans une beauté qui nous fascine et nous interpelle.
Dans le parcours proposé à « la Remise » de Pollionnay : des cartographies déportées, représentations géographiques de forces qui poussent le monde entier à muter. Car pour LEMOCK, l'espace est fait de projections mentales. Des représentations souvent figées qui délimitent nos ignorances. En modifier le point de vue, désaxe nécessairement notre improbable objectivité et permet d’ouvrir un point de questionnement.
Ses collages explorent cette question. Sa fascination pour les cartes lui donne la possibilité de recréer l’espoir d’un monde en mouvement où le voyage le plus beau serait celui qu’on imagine plutôt que celui qu’on vie. De là naissent ses territoires intérieurs grâce à d’évocatrices cartographies imaginaires. Ces iles sont irriguées comme les individus qui y vivent. Les analogies sont criantes et décalent constamment le regard suivant l’échelle qu’on lui prête.
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